A cette époque, ça boxait encore à l’Elysée Montmartre. La boxe était une fête. Et pas seulement à Paris. On écumait aussi les galas de province. Après des heures de route, on débarquait, hagards et fourbus, de la CX rouge de Gérard. Juste à l’heure pour la pesée et une visite médicale sommaire. Ensuite, on descendait dans la fosse aux lions. Toujours bons pour le service, les boxeurs de Choisy ! Avec Monsieur Teissonnières, on avait appris à ne jamais se plaindre. Même quand on avait mal, peur, froid, faim ou que nous étions épuisés. « Serre les dents », disait-il. La boxe est une implacable école de la résistance. Il nous fallait compter que sur nous-mêmes. L’un des membres glorieux de notre héroïque équipe était Aude Mambole. Licence n° 32991, précise son livret fédéral. C’est Marie-Anne Teissonnières qui me l’a fait parvenir. Une véritable petite pièce de musée. Mambole était un élégant boxeur, plutôt styliste, mais très combatif. Il avait une garde haute, bien hermétique et était toujours en mouvement sur le ring. Sautillant, virevoltant, il balançait ses directs du gauche en piston et enchaînait en droite, gauche, droite. Il savait aussi travailler en rapides séries à mi-distance. Je me souviens de certains de ses combats spectaculaires à Pouchet. Devant des adversaires coriaces, il ne reculait pas et acceptait même la bagarre en rendant coup pour coup. Le public se régalait. A la salle aussi, il savait se faire respecter. Toujours de bonne humeur, il était très fair-play. « Elle est mambo, la maladie ! Mambo, mambo du décalco », chantonnait parfois ce sacré Gérard, en reprenant le tube de Richard Gotainer, pour le titiller. Son premier combat amateur remonte au 30 octobre 1983. Il y a bientôt 30 ans, jour pour jour. Vous vous rendez compte, mes amis : 30 ans déjà ! C’était à Pouchet. Challenge du 1er round, passage obligé des débutants. Il faut noter un détail significatif : Mambole entrait dans la compétition en huitième de finale ! Aujourd’hui, c’est impensable. A l’époque, il y avait du monde et la concurrence était féroce en super-légers. Pour remporter le Challenge du 1er round, Aude devait gagner 4 combats. Il échouera en finale, le 11 décembre 1983 contre un certain Yakhioui Abes (arrêt de l’arbitre au deuxième round). Je me souviens aussi qu’il souffrait d’une fragilité à l’oeil (gauche, je crois) qui l’avait un peu pénalisé dans sa carrière. Son dernier combat (enregistré sur le livre de la FFB en ma possession) remonte au 27 avril 1985 contre un certain Gonneau. Perdu aux points. David Aucagos, l’un de ses proches amis, ancien boxeur du club, vient de me donner des nouvelles réconfortantes de notre ami sur lequel circulaient des rumeurs de disparition. David me précise également que Mambole a boxé jusqu’à la fin des années 80, notamment contre Cessiron, Duverger, Klose… De sacrés clients.
Nasser NEGROUCHE
